Été 2022
Bien chers amis, marraines et parrains de l’internat Claude Sagnes.
Ainsi reviennent nos petites histoires des filles de Diembering.

Comme prévu je suis retournée en Casamance le 21 février pour un séjour de cinq semaines. Oumeya Elouadie m’a accompagnée les trois premières semaines, travaillant sans relâche et avec grande efficacité, tant à l’internat que dans les actions dentaires d’AMK. Je vous laisse avec elle pour vous raconter tout cela !
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Oumeya Elouadie. 24h de voyage et nous voilà à Diembering. Il faut bien ce temps pour traverser les pays, les mers et les continents. Nous nous arrêtons au bord de la « départementale » ; on dit plus localement « le goudron ». Quelques minutes à pied sur la piste ensablée et nous arrivons au portail de l’internat.
Sa localisation est bien choisie par rapport au village dont le centre se trouve à une dizaine de minutes à pied ; cela peut être plus complexe pour Anne-Marie la cuisinière lorsqu’elle charge sur sa tête de lourdes denrées depuis chez elle ; elle apprécie qu’on passe la chercher quand nous avons la voiture !
L’internat offre de très bonnes conditions aux jeunes filles : eau et électricité en autonomie, salles d’étude avec bureaux personnels, repas midi et soir assurés. Elles doivent chacune s’occuper et s’entraider pour les révisions et les devoirs. À cela s ‘ajoutent les tâches quotidiennes partagées : aide à la cuisine, nettoyage des sanitaires, des espaces communs et réfectoire (lavage tous les jours à l’eau avec la serpillière, voire deux fois par jour !), arrosage du potager… Bel apprentissage ! En cela l’internat remplit bien sa fonction éducative.
Le nouveau foyer vient compléter ce cadre presque idéal. À notre arrivée, il ne manquait que la porte d’entrée à cette nouvelle pièce ; le carrelage, le toit, les volets et l’électricité étaient terminés. La porte fut installée quelques jours plus tard par Etienne, notre maçon fantôme… mais à l’envers ! Un verrou supplémentaire posé à l’intérieur permettra de sécuriser la pièce plus convenablement ainsi que la pose de grilles aux fenêtres.

Il restait maintenant à peindre les murs et à donner une « âme » à cet espace… Facile !! Isabelle ayant fait le choix d’une peinture naturelle et peu coûteuse, nous voilà devant trois gros seaux de chaux… vive… seule version disponible ici ; il fallait donc l’éteindre ! Ni une ni deux ! on emprunte une marmite et un tamis à la cuisine (ça va chauffer !), des seaux de toutes tailles et voici une quinzaine de filles équipées de gants jusqu’aux coudes, prêtes à éteindre ces mystérieux cailloux. Après quelques essais peu concluants, mais exploitables, nous laissons les filles finir le premier seau sous étroite surveillance. La suite est prévue en fin d’après-midi, mais à notre retour stupéfaction ! de découvrir le second seau préparé à la bonne texture fine et lisse ! Les travaux pratiques de chimie ont porté leurs fruits.
C’est parti pour la première couche de badigeon. Une douzaine de filles s’activent ; chacune a son pinceau, rouleau, brosse à tapisser, voire une vieille brosse… à dent ! Pour les recoins c’est pratique… L’atelier dégénère rapidement : dessins sur les joues, les bras, les mains ; « attention vous allez avoir des peaux de crocodiles ! ». Tout le monde à la douche et en même temps ! Chacune sa brique ou son tabouret, son seau, son écuelle… dans le jardin ! Instant quotidien à l’internat, le moment de la douche est un moment convivial où l’on partage des blagues, où l’on chante le dernier tube à la mode.



L’équipe jardin les rejoint, bien entendu, après l’élaboration d’une clôture autour du potager grignoté par les poules du voisin. Construction 100 % locale à base de feuilles de palmier, branches coupées au coupe-coupe aux alentours, morceaux de moustiquaires. On termine la clôture par un peu de maçonnerie au niveau de l’entrée du potager. Chacune apporte son expertise sur la préparation du ciment, la disposition des briques ; héritage familial pour certaines, apprentissage pour d’autres. Et l’on finit par une dédicace de chacune sur le ciment frais.


Au fur et à mesure de mon séjour j’ai découvert que l’internat était toujours un endroit très vivant ; excepté lorsque les filles sont en cours, évidemment. Le lieu paraît si vide en leur absence le matin ! Ensuite elles arrivent, seules ou par groupe de deux ou trois, sur le coup de midi… « Anne-Marie ! Isabella ! Oumeya ! Ça va bien ? » chaque fille passe le portail et on entend nos prénoms.
Certaines s’approchent, jettent un œil à nos activités avec curiosité, vont se doucher puis reviennent participer à nos travaux pour cinq ou dix minutes, surtout pour la peinture de la fresque du mur central, sur une idée d’Isabelle.
Un mercredi après-midi je leur propose une séance photo à toutes ; on installe un studio de fortune avec des draps et un peu de musique. Chacune prend le temps de s’habiller pour l’occasion, puis devant l’objectif on s’échange des bijoux, des chaussures pour parfaire la tenue. Le tout nouveau foyer bourdonne tel une ruche, entre les 4ème qui prennent la pose, les petites qui prétextent l’avancement de la fresque pour profiter du spectacle, et les 3ème installées sur un banc pour une dernière révision avant leur composition de l’après-midi, mais qui n’en perdent pas une, elles aussi ! Ce fut une belle occasion de révéler chacune d’elles. Un beau moment pour moi également !

La journée s’est terminée en cuisine pour préparer ensemble des rouleaux de printemps pour le soir. J’avais apporté de France quelques ingrédients pour cette approche de cuisine asiatique, mais ce sont les crevettes et les cacahuètes du coin qui ont donné du goût ! Cela manquait de piment pour certaines, de coriandre pour d’autres, mais les perles de tapioca à la banane et au lait de coco en dessert ont fait l’unanimité !

Après ces quelques semaines, l’heure de mon départ sonne déjà ; difficile de quitter cette bande de filles pleines d’envies et de vie !
La mission est passée très vite, bien remplie par les travaux à l’internat mais aussi par les activités liées aux cabinets dentaire d’Elinkine et de Diembering, et par la prévention dentaire dans les écoles.
Nous avons eu le temps d’améliorer et de réparer pas mal de choses ; il y a encore de nombreux détails à finir, mais le travail d’Isabelle et des autres bénévoles ces dernières années est colossal. Le nouveau foyer va permettre de nouvelles activités. Les ateliers participatifs avec les internes sont à développer pour les prochaines missions, dans le but d’échanger et d’apprendre ensemble.
Je suis prête à revenir l’année prochaine… et impatiente de revoir la petite Oumeya, petite fille d’Anne-Marie, la cuisinière : elle a hérité de mon prénom à sa naissance pendant mon séjour. Me voilà liée à Diembering pour toujours !

Oui, le séjour d’Oumeya s’est passé on ne peut mieux ! Et les contacts écrits et téléphoniques continuent entre la jeune photographe et ses jeunes modèles !
Après son départ j’ai tenté de finir une bonne fois pour toutes les cinq ou six bricoles qu’il restait à faire : maçonnerie par-ci, reprise de soudure par-là. Mais avec un maçon aux abonnés absents et un soudeur overbooké, ce fut compliqué ! Même si parfois des petits miracles peuvent se produire, tel le jour où un couple de touristes normands de passage à Diembering sont quasiment tombés nez à nez avec l’ancienne dentiste de leur village (notre célèbre Christine) attablée devant son plat de riz-poisson quotidien. Passé le temps des retrouvailles et des explications de notre présence au village, Laurent n’a pas hésité à nous proposer son aide technique et s’est retrouvé quelques heures plus tard, la truelle à la main en compagnie de Célestin pour enfin terminer l’élargissement de la porte du local solaire permettant d’y entreposer le gros congélateur… Un grand merci à eux pour ce coup de pouce improvisé qui nous a bien aidées.
Cela ne semble pas, mais pour la moindre réparation, nous nous trouvons souvent face à deux genres de problèmes :
- trouver un bon professionnel compétent et avoir la voiture disponible pour le convoyer lui et les matériaux sur le chantier (au mieux ils ont une petite moto). Cela demande d’être présent constamment si on veut finir rapidement les travaux ;
- trouver du matériel de qualité que je définirais comme basique, en France, mais qui fait plutôt partie du luxueux au Sénégal ; le moindre robinet, tuyau, contreplaqué, peinture, interrupteur, prise de courant…, tout est de très mauvaise qualité (chinoise le plus souvent), à quoi s’ajoutent les conditions climatiques : chaleur, humidité, sable et corrosion marine ; cela nous donne des réparations incessantes.
À mon départ, début avril, le nouveau foyer était prêt à accueillir les quatre ordinateurs ou tablettes qui ont été amenées ; la machine à coudre s’installait sur un deuxième petit bureau ; une petite étagère rassemblait tout le matériel et les outils ; le gros congélateur pour la réserve de poisson entamait une deuxième vie, refait à neuf par le technicien du froid ; 11 robinets avaient été changés (fuites+++) afin de moins solliciter la pompe pour le remplissage des cuves.
Des nouvelles depuis ? La situation alimentaire se dégrade quelque peu au Sénégal. Amy et Yamta, les directrices, se démènent pour gérer le budget au mieux, mais me font part de l’augmentation de près de 20 % du prix des aliments de base (le poste ravitaillement a en effet augmenté de près de 150 € ces dernier mois). Elles ont, en juin, bénéficié d’une dotation alimentaire conséquente sous forme de légumes de la part de la fondation Club-Méd. Les filles ont chaleureusement remercié les donateurs et fait part de leur intérêt pour le renouvellement de ce genre de don…
Nous allons finir ces nouvelles par le traditionnel petit point financier. Ces imprévus liés à la situation mondiale grèvent un peu le budget prévu, sans toutefois qu’il y ait péril en la demeure. Il serait bien de reconstituer la petite réserve qui a été bien entamée par les travaux d’entretien et l’augmentation du coût de la vie.
Cela m’amène à proposer, à ceux d’entre vous qui en seraient d’accord, de passer à 20 € les prélèvements ou virements mensuels ; si tel est votre cas, veuillez m’en avertir afin que je le note bien pour qu’il n’y ait pas d’erreur au final sur vos reçus fiscaux.
Cela m’amène à proposer, à ceux d’entre vous qui en seraient d’accord, de passer à 20 € les prélèvements ou virements mensuels ; si tel est votre cas, veuillez m’en avertir afin que je le note bien pour qu’il n’y ait pas d’erreur au final sur vos reçus fiscaux.
D’autre part, pour en finir avec ce sujet, j’ai observé que, pour certains d’entre vous, les ordres de virement mensuel n’avaient pas été reconduits en début d’année. Veuillez avoir la gentillesse de vérifier si l’ordre de la banque n’est pas à refaire ou bien, si c’est le cas, de m’informer de votre désir de suspendre vos parrainages. Je vous en remercie.
Ces nouvelles de l’internat Claude Sagnes finiront dans la joie mais aussi dans la tristesse. La joie, c’est Fatima qui fut directrice jusqu’à l’an passé et qui nous a fait part en mai de la naissance de sa fille Anna. La tristesse, c’est la disparition de Sylvie, que nous venons d’apprendre, attentionnée missionnaire AMK et fidèle marraine de l’internat.
Je vous remercie chères marraines et chers parrains de toute l’attention que vous portez à l’internat et aux 30 filles qui y vivent, étudient, chantent, rient et sourient ! Je vous souhaite de passer un bon été, entourés de vos proches. Je vous donne rendez-vous en automne, avec sûrement de nouvelles histoires et de nouveaux projets…
Isabelle